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MIDLAKE, The Courage of Others

Bella Union/2010

Avec quatre (bientôt cinq) albums au compteur comme autant de façons d’explorer le folk-rock contemporain, Midlake est un groupe au parcours fort intéressant, finalement hors-norme, se réinventant album après album, allant même jusqu’à changer de chanteur. On se penche aujourd’hui sur The Courage of Others, leur magnifique troisième opus qui lorgnait vers des sonorités folk 60’s et psychédéliques.

Formé à Denton, Texas fin des années 90, Midlake se compose initialement de musiciens étudiant tous à la University North Texas College of Music. D’abord nommé The Cornbread All-Stars, la formation plutôt orientée jazz se tourne vers l’indie rock et sort sous son nouveau nom un premier EP, Milkmaid Grand Army EP, en 2001. Sa musique, influencée par Radiohead, The Flaming Lips, Jethro Tull ou Grandaddy, s’articule autour d’un basse-batterie, de vieux synthés tels que le mellotron et des motifs de guitare typiques du rock indé. Une musique certes bancale mais qui commence à prendre forme. Ces chansons attirent l’attention de Simon Raymonde, le boss de l’excellent label anglais Bella Union qui les signent. En 2004 sort un premier album remarqué, Bamnan and Silvercork. Le style s’est affiné, l’aspect bancal s’est changé en marque de fabrique, les claviers vintage sont toujours là, les rythmes bien présents, les musiciens alternant morceaux dans la pure tradition indie et instrumentaux dans une veine électronica.

Délaissant un temps le côté psyché, le groupe de Denton se tourne ensuite vers la musique des 70’s, celle des groupes et artistes de Laurel Canyon (CSNY, Joni Mitchell, The Byrds et Gene Clark…) et le soft-rock façon Fleetwood Mac période Californienne, Kansas ou encore America. Enfanté dans la douleur (le disque a été enregistré et ré-enregistré sur une période de presque deux ans) mais porté par les impeccables Roscoe, Head Home et Young Bride et de riches instrumentations et harmonies vocales maitrisées, The Trials of Van Occupanther sort en 2006 et le groupe, qui va beaucoup tourner et surtout en Europe, gagne en renommée. La tournée cesse et Midlake se met au travail (un long effort là aussi) et fait paraître en 2010 The Courage of Others. Certes, l’influence Laurel Canyon demeure mais la bande à Tim Smith s’oriente vers des influences folk anglais des 60’s-70’s. Ajoutez à cela une pochette en hommage au film Andreï Rublev de Tarkovsky, vous obtenez un bel objet musical où le songwriting de Tim Smith et le jeu subtil de ses camarades font ensemble des merveilles.

Les flûtes d’obédience médiévale remplacent les claviers biscornus à la Grandaddy. Les intros en fingerpicking nous renvoient 50 ans en arrière et l’on y entend des sonorités à la Nick Drake, Pentangle, Fairport Convention, Robert Wyatt. Acts of Man débute l’album. Une introduction tout en acoustique. Les harmonies vocales, la flûte de Tim Smith, c’est la parfaite introduction à un album qui fera montre de beaucoup de cohérence et finira par ouvrir des portes au bout de quelques écoutes. À priori dans la même veine, Winter Dies rompt avec cette fausse monotonie pour s’engouffrer dans une brèche prog et devenir l’un des plus beaux morceaux de Midlake. Idem pour Small Mountain et Core of Nature, parés de guitares synthétiques et de contre-chants travaillés.
Courte respiration au milieu du disque, Fortune suggère via quelques arpèges boisés, une certaine poésie pastorale. The Horn, avec son riff de guitare saturé et sa mélodie un brin médiévale évoque un Neil Young en cotte de mailles menant son cheval fou vers un combat épique. Une envolée folk-prog tout comme ce Courage of Others qui démontre la finesse mélodique de Midlake. Toujours dans la lignée du folk anglais des années 60, celui-là même qui invoquait troubadours du Moyen-Âge et atmosphères à la Tolkien, In the Ground termine l’album, comme il a commencé, avec ces accords folk, les flûtes et le timbre velouté de Tim Smith. Alors, oui, ce disque en aura perdu plus d’un, taxant The Courage of Others d’erreur de parcours, de disque redondant. Les autres y auront vu une continuité dans le travail d’écriture et de composition des Américains ainsi qu’une ouverture supplémentaire dans leur exploration musicale.

Après avoir tenté, en vain, de clôturer un nouvel album dont il ne trouve plus la clé, Tim Smith, chanteur et songwriter principal, quitte Midlake en 2012. Il ne se sent plus en phase et tente l’aventure en solo avec le projet Harp (un titre seulement est sorti depuis 2012 mais le projet est réveillé début 2021). Fini ce chant personnel et hanté, Smith cède quelques chansons alors en cours d’élaboration. Puis, le groupe se reprend en main et installe Eric Pulido, guitariste et par ailleurs excellent chanteur (son chouette projet solo E.B. The Younger), aux commandes. Deux nouveaux membres font leur apparition et le joli Antiphon paraît en 2013. Revenu à une musique peut-être un peu plus accessible, Midlake fera paraître le 18 mars prochain For the Sake of Bethel Woods, introduit par le très réussi Meanwhile, qui préfigure une orientation space-rock.

Georges.

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