Sonatine
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À peine plus d’un an seulement après Ce Lien Entre Nous, l’excellente maison Sonatine nous gâte et publie, en ce début d’année 2022, Nos Vies En Flammes, le quatrième roman de David Joy. Impossible, évidemment, pour nous de ne pas nous y intéresser, l’auteur originaire des Appalaches étant un de nos incontournables, toute nouveauté devenant une priorité. Il explore ici un des thèmes qui le préoccupe tout particulièrement, depuis des années, cette crise des opioïdes qui ronge littéralement la jeunesse américaine. Alors, si on n’est pas surpris par le thème choisi – il en était déjà un peu question dans Le Poids Du Monde – il faut avouer qu’on est même plutôt excité à l’idée qu’il le traite de manière plus frontale, qu’il prenne le dossier à bras le corps et nous concocte une histoire comme lui seul peut le faire.
Garde forestier à la retraite, Raymond Mathis vit seul, à l’écart dans sa ferme des Appalaches avec sa chienne Tommy Two-Ton. De sa montagne, il observe, impuissant, les incendies qui ravagent la forêt et assombrissent le ciel. Il est veuf et son fils, Ricky, ne vient que de temps en temps… Pour prélever un peu d’argent, des petits bijoux ou vêtements, les deux trois bricoles qu’il pourra revendre pour s’acheter de quoi se faire un fix. Le jeune homme n’est pas un cas isolé, toute la région est touchée par ce fléau et la police locale parait bien dépassée par l’ampleur du problème. Le mal est partout : les toilettes d’un diner, l’arrière d’une station-service, le coin de la rue ou encore au cœur même de la forêt…
Ricky est dans une spirale destructrice et les ennuis s’accumulent. Un soir, Ray reçoit l’appel d’un type qui veut récupérer la somme rondelette que le jeune homme lui doit. Ils vont alors procéder à un échange, l’occasion pour le garde forestier de mettre la main sur son fils et tenter, une énième fois, de le sortir de ce marasme. Malheureusement, Ricky ne tardera pas à replonger et son corps sera retrouvé quelques jours plus tard dans un mobile-home. Pour Raymond, c’en est trop. Ne supportant plus l’inaction de la police, il va prendre les choses en main pour punir, à sa façon, les meurtriers qui distribuent cachets, poudre et autres cristaux dans tout le comté, un coup de pied dans la fourmilière nécessaire dont il est prêt à assumer les conséquences.
Que dire ? Une fois de plus, avec ce quatrième roman, David Joy nous guide au cœur de la tempête, chahutés que nous sommes par un sujet fort, qu’il porte avec rage et détermination. On a déjà souligné à plusieurs reprises par le passé le talent de Joy pour composer des personnages terriblement incarnés et attachants, et là, ce vieil homme solitaire est un phare sur lequel on aimerait tous pouvoir compter. Nos Vies En Flammes nous livre un constat lucide et cruel de la situation dans laquelle sont plongés les États-Unis, aujourd’hui, dans ces coins reculés où tout paraît loin : services de santé comme forces de l’ordre ou encore emplois attractifs.
Incontestablement, David Joy est un des témoins majeurs de cette déchirante réalité, un des maîtres du rural noir.
Décidément, après Pete Fromm et son Lac de Nulle Part – et sur les sujets qui nous animent, ici sur ce blog – 2022 commence bien et nous réserve encore de belles choses, comme au mois de mars la sortie du troisième roman de Todd Robinson, Les Morts de Riverford (Gallmeister) et au mois d’avril le premier roman traduit en français d’un auteur qu’on a très très hâte de découvrir et que nous recommande chaudement David Joy : Shawn A. Cosby (Les Routes Oubliées – Sonatine), stay tuned !
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