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The Grim Reaper, HAROLD MARTINEZ

Trou Noir / L’Autre Distribution / 2019

Comme From Richmond to Tacoma traite de littérature et de musique américaine, on se demandait si cela était cohérent de parler d’un groupe français dans ces pages. Pourtant parmi les artistes et groupes hexagonaux, Harold Martinez imprime sa marque de fabrique depuis 2012. Avec trois albums au compteur, le guitariste et chanteur Harold Martinez accompagné du batteur Fabien Tolosa délivre une Americana rêche et rythmée, un rock acoustique teinté de blues et de folk porté par une voix troublée et incontestablement hantée. Un univers singulier – pas “made in America” certes – mais qui mérite tout de même qu’on s’y attarde un peu.

Harold Martinez et Fabien Tolosa sont originaires de Nîmes. Marqué par un père mélomane, Martinez se met à la guitare et commence à composer, Tolosa qui est multi-instrumentiste viendra plus tard le soutenir à la batterie et aux arrangements. Au fil des années, leur musique semble s’être nourrie des musiques rock et rap entendues dans les vidéos de skateboard, des B.O. de western, des épopées électriques de Neil Young & Crazy Horse, du folk-rock désertique de Giant Sand et des incantations de The Doors, de Wovenhand et de Nick Cave. Et toujours dans le viseur ces histoires de fantômes, de personnages de cinéma et de héros déchus.
Dernier volet d’une trilogie entamée avec Bird Mum (2012) et Dead Man (2014), The Grim Reaper continue d’explorer le thème de la faucheuse qui donne son nom à l’album. The Grim Reaper est d’ailleurs un hommage à l’ami ingénieur du son Michel Garcia, disparu en 2016.

Harold Martinez puise ainsi son inspiration dans les drames de l’existence, la perte et fait varier les atmosphères. Dès l’introductif Burn War Party, le duo lâche les chevaux. Un banjo donne le ton, les basses vrombissent lourdes ou bien sâturées d’électricité, les deux musiciens mêlent également des sons synthétiques à une rythmique endiablée et des guitares hispanisantes (Funeral Rite). Comme chez Johnny Cash (période American Recordings VI, le morceau Ain’t No Grave), on entend le bruit des chaines de prisonniers, un riff fièvreux et une basse ronronne comme pour laisser les bons temps rouler (ou les mauvais plutôt) dans cette parade funèbre. La montée en puissance du titre Six Feet Under est également remarquable.

Cinématographiques et envoûtantes, les chansons de The Grim Reaper s’immiscent petit à petit en vous, comme une sorte de transe vaudou qui trouverait aisément sa place sur la B.O. de la série True Detective et pourrait également accompagner la lecture du roman de S. Craig Zahler, Les Spectres de la Terre Brisée.

– Georges –

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