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Paradox Hotel, ROB HART

Belfond

Author-Rob Hart — HG LITERARYNous avions découvert Rob Hart, citoyen New-yorkais de 41 ans, en 2020 avec son premier roman Mothercloud (Belfond) et son écriture cinématographique nous avait immédiatement convaincus. Ami de Todd Robinson et S.A. Cosby – deux auteurs que nous tenons en grande estime ici – il explore néanmoins un territoire différent, celui du thriller dystopique. Alors qu’il y a trois ans, il nous livrait une réflexion glaciale sur les dérives possibles du e-commerce, il aborde là avec Paradox Hotel (Belfond – février 2023) un thème riche de fantasme, celui du voyage dans le temps et des questions que son commerce soulèverait une fois la technologie stabilisée et encadrée.
C’est avec un peu de retard que vous nous proposons notre chronique et beaucoup de lecteurs en ont déjà parlé et tant mieux, mais nous tenions à le faire tout de même, à notre tour, tant le travail de Rob Hart nous enthousiasme.

January Cole est responsable de la sécurité au Paradox Hotel, établissement de standing, précurseur dans l’accueil de visiteurs privilégiés souhaitant voyager dans le temps, structure et technologie appartenant au gouvernement des États-Unis. Plusieurs époques et plusieurs ambiances y sont proposées bien évidemment – règne des pharaons dans l’Egypte antique, première et seconde guerre mondiale en Europe, ère des dinosaures – mais contrairement à Westworld ou Jurassic park, nous ne sommes pas là dans un parc à thème, mais dans l’instant même où l’Histoire s’est jouée, d’où l’importance vous imaginez bien d’une agence de régulation : l’ART, qui vérifie l’impact des ces voyages sur les évènements et d’un service de sécurité efficace scrutant le sérieux et le bon comportement des voyageurs. Mais voilà, tout cela coûte cher et le gouvernement souhaite vendre le lieu. C’est dans ce but qu’un sommet doit se tenir au sein de l’hôtel avec les parties les plus riches et les plus intéressées venant des quatre coins du monde. C’est là que se décidera qui, parmi ces candidats, sera l’heureux acquéreur. Hors de question que l’argent soit l’unique critère bien entendu, l’éthique est primordiale, l’Histoire n’est pas un caprice avec lequel on peut jouer.

D’ailleurs, le voyage temporel n’est toujours pas une chose anodine et présente encore certains dangers pour le corps et notamment pour le cerveau, demandez donc à January. Elle en subit les conséquences depuis un moment, elle est décollée, comme on dit, c’est à dire que parfois son cerveau s’égare. Cela s’appelle “une dérive”. Le passé vient se percuter au présent, les souvenirs à la réalité de façon presque tangible. Ce trouble apparait quand on est amené à faire des allers-retours un peu trop souvent, mais que voulez-vous, pour January Cole, ça fait partie du job. Et quand ces souvenirs font apparaître, au coin d’un couloir ou dans votre salle de bain, la femme que vous avez aimé, il est difficile d’y renoncer.
Mais quand tout l’hôtel se met à dysfonctionner et que passé et futur infiltre votre cerveau et votre présent, que vous devez résoudre un meurtre qui n’a pas encore eu lieu et dont vous seul pouvez voir le corps et que vous coursez des raptors ramener potentiellement par un voyageur inconscient, il y a de quoi perdre le nord.

Une fois de plus avec Rob Hart, ça fonctionne super bien, c’est brillamment construit, rythmé, on ne s’ennuie jamais. Le propos est intelligent et le sujet traité avec beaucoup de finesse. Il ne s’agit pas là de remettre en cause ce que le futur pourrait nous réserver de surprises et d’avancées technologiques spectaculaires, mais plutôt l’humain, sa cupidité et l’usage qu’il en fera. Mettre la main sur ce genre de technologie pour influer sur le cours du temps, tout le monde peut en mesurer les enjeux, tout le monde rêve de revivre un moment du passé et peut-être de pouvoir corriger une erreur, prendre une autre décision, tenter de sauver quelqu’un… Et forcément politiques, hommes d’affaires et activistes y voient leurs intérêts.

Ce deuxième roman de Rob Hart, impeccablement traduit par Laurent Bury, est un mélange habile de “qui joue avec mon cerveau ?” à la Inception et de divertissement à la Jurassic Park ou Retour vers le futur, un souffle vivifiant dans le milieu du roman d’anticipation souvent engoncé dans ses clichés. January Cole est une héroïne attachante au caractère bien trempé et le duo qu’elle forme avec Ruby, son drone, nous offre des dialogues savoureux.
Il y a trois ans nous évoquions Bienvenue à Gattaca et Soleil Vert au sujet de MotherCloud, cette fois c’est Nolan, Zemekis, Spielberg, Doc & Marty McFly, Ian Malcolm et Michael Crichton qui s’invitent dans cette chronique… Voilà. Il vous en faut plus pour vous convaincre ?

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© photo : Michael McWeeney – 2020 – All Righs Reserved

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