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Aquarium – L’Obscure Clarté de l’Air, DAVID VANN

Gallmeister

En attendant la sortie de Un Poisson sur la Lune début février, retour sur les deux précédentes publication de David Vann chez l’éditeur parisien.

Il y a dans les publications de David Vann quelque chose de familier, commune dans chacun de ses ouvrages, depuis ses débuts et les premières lignes de Sukkwan Island. Même si les histoires sont différentes, on y trouve un schéma narratif commun, celui de personnages faisant souvent partie des couches les moins gâtées de la société, mais qui sans pour autant avoir de facilité arrivent à survivre, sans se plaindre, où on les sentirait presque heureux ou du moins adoptant la situation telle qu’elle est, s’y habituant, jusqu’à ce qu’un évènement vienne perturber l’équilibre et où alors les récits de Vann prennent une tournure noire. Car c’est bien de cette couleur que l’auteur remplit ses pages. On l’avait bien vu dans Impurs ou dans Goat Mountain, et ces deux dernières parutions de l’écrivain américain ne dérogent pas à la règle. Bien que différentes dans leur contenu, elles ont bien des points communs, dont celui de la tragédie.

Dans Aquarium, on rencontre Caitlin, douze ans, vivant seule avec sa mère dans la banlieue de Seattle, son seul moyen de s’évader est sa visite chaque soir après l’école à l’aquarium de la ville de l’état de Washington, en attendant que sa mère termine son triste travail au déchargement des porte-containers au port local. Et depuis plusieurs jours, Caitlin fait la connaissance d’un vieil homme et cette rencontre va vite transformer la vie de l’adolescente quand sa mère l’apprendra. Un secret sera alors révélé et la vie de la jeune fille va alors devenir un véritable puits de noirceur et la relation avec sa mère prendre une tournure véritablement malsaine.

Aquarium est alors totalement dans la continuité des publications qui les précédaient, avec une tension dictée par des chapitres courts où paragraphes descriptifs et dialogues s’enchainent sans distinction. Un style qu’on retrouve dans L’Obscure Clarté de l’Air, où même si le sujet tranche radicalement avec l’univers auquel nous a habitués l’auteur, reste finalement dans l’illustration de la tragédie qui habite l’œuvre de David Vann.

De son aveux, l’écrivain se dit toujours avoir été influencé par les Grecs, et il qualifie lui-même ses écrits de tragédies grecques. Il faut trouver cette source au début de son cursus universitaire où pour la première fois il étudie le mythe de Médée. Avec L’Obscure Clarté de l’Air, il réalise un projet qui trainait dans un coin de sa tête depuis vingt-cinq ans en  adaptant avec ses codes ce passage de la mythologie grecque. Il compte alors la fuite de Médée à bord de l’Argo au côté de Jason, sous la menace de son père, elle qui emmène avec elle le corps démembré de son frère qu’elle a elle-même tué. Vann modernise alors le mythe, et offre une histoire noire et violente, entre vengeance, trahison et désillusion avec tout l’ésotérisme dans lequel baigne la mythologie, de ce qui est sans aucun doute un des premiers récits féministes de la littérature.

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